vendredi 9 février 2018

Flashbacks



Nous avons vécu, nous nous sommes aimées, nous avons ri, nous avons pleuré,
Notre amour ne devait jamais avoir de fin,
Le ciel pouvait bien attendre, nous avions l'éternité pour nous.

Et aujourd'hui, seule dans ce club, je repense à toi.

Je ferme les yeux et j'imagine que tu es à nouveau contre moi.
Je sens tes mains sur mes hanches, ton souffle sur ma nuque,
Je nous revois, valsant jusqu'au bout de la nuit, nos corps serrés et enlacés, sans jamais se lasser, si enivrées de brumes et de vapeurs sous la lumière des projecteurs, au son de ce slow syncopé aux pas chaloupés, dansant comme deux frêles esquifs au milieu du dance floor sur une mer en furie de nos désirs furieux de nos deux corps, instants chavirés de l'amour prêt à nous engloutir toutes les deux, happées par son tourbillon qui allait bientôt nous entrainer vers ses abîmes et sa fosse des Mariannes, puisque de nos deux amandes nous nous apprêterions bientôt à faire Philippine.

Je ferme encore les yeux et je sens ton parfum, ton odeur, ta présence.
Je me souviens de mes mains se perdant dans tes cheveux, caressant doucement ta peau.
Ton regard, tes yeux, légèrement voilés par les boîtes à fumée, brillants sous les spotlights
 Le goût de tes lèvres ourlées que j'effleurais, ta bouche sublime et délicate, et ses rangées de perles nacrées, sur lesquelles je promenais un instant ma langue, avant qu'elle ne rencontre la tienne, et puis...
Et puis nos doux baisers, seules au monde au milieu des danseurs, naufragées volontaires, emportées jusqu'à ce merveilleux voyage au bout de la nuit quand nous avions fait la fermeture du club.

Je ferme plus intensément les yeux et je nous revois, toi me prenant la main jusqu'à ton appartement, et l'ascenseur qui nous emmenait à ton étage, le 7ème je crois, promesse et prémices, le long couloir que nous avions mis une éternité à traverser, tiraillées entre le moment de profiter de chaque instant fugace de ce bonheur qui nous tendait les bras et le moment où nos corps libérés de nos carapaces allaient enfin communier, l'envie le disputant au plaisir de se retenir encore et encore, pour ne pas rompre la magie de ces instants.
Ta clef ayant du mal à trouver la serrure de ta porte, tant nos gestes désordonnés d'envie de tendresse et d'amour fou embrouillaient nos sens.
Ton salon où nous avions jeté nos vêtements, impatientes de nous découvrir enfin, faisant glisser nos dentelles, puis ton sofa sur lequel nous nous étions ruées, avides de nos caresses et de nos soupirs trop longtemps contenus.
Cette première nuit, qui nous a trouvées, révélées, comblées au-delà de nos espérances, et puis ces jours et ces nuits qui ont suivi, avec chaque fois la passion et le désir qui rythmaient nos vies, nos vices et nos envies.
Un amour infini...

My eyes are wide shut now et je repense à ce titre d'Abba...
"But tell me does she kiss like i used to kiss you ?
Does it feel the same, when she calls your name ?
The winner takes it all, the looser has to fall..."
Le même club, notre dernière danse, les mêmes fumées, les mêmes spotlights, mais plus les mêmes regards. Les absentes ont toujours tort mais aujourd'hui c'est ton absence qui me cause du tort.
We lived, we loved, we laughed, we cried...ces mots dansent dans ma tête
You say your lover buys you lace
Je t'imagine entre ses bras, vos soupirs, tes dentelles, mon ciel s'est écroulé, mon monde a vécu ce que vivent les fleurs, et c'est une autre qui vient butiner la tienne.
I only want, I want to wish you well
Je vais bien, te savoir heureuse enlève un peu de ma peine...adieu belle âme, adieu amour...
Nothing else for me but hell, hidden in my shell

J'ouvre enfin les yeux et le songe s'estompe...le club est vide...vide de toi...suis-je encore seulement là ?
Adieu mon doux rêve...de ton amande, mon doux extrait de cyanure au goût suave et amer, il ne me reste désormais plus que quelques morceaux acérés de coquille vide, comme ces éclats de mitraille fauchant les soldats en lacérant leurs chairs avant de venir se planter dans leurs cœurs. Le mien est mort et ne se relèvera plus, tout comme eux, tout comme mon vaillant petit soldat montant la garde du haut de mes remparts de chair, qui ne subira plus jamais tes assauts, alors il restera encapuchonné dans son linceul.

© Mr. Blue (Michael Francks)
© Les Contes Oniriques, 2017
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